Soc. 11 avr. 2012, n° 11-11.037
L’article L. 1233-45 du code du travail institue une priorité de réembauche au bénéfice du salarié licencié pour motif économique.
Le texte n’opérant pas de distinction, tout salarié licencié pour motif économique bénéficie de cette priorité, peu important le nombre de salariés licenciés, les effectifs de l’entreprise, comme l’ancienneté du salarié. La portée de la priorité de réembauche n’en est pas moins affectée par un certain nombre de limites. Elle n’est, en premier lieu, applicable que dans le délai d’un an qui court à compter de la date de la rupture du contrat de travail et à la stricte condition que le salarié en fasse la demande au cours de ce même délai. En second lieu, il résulte du principe du libre-choix par l’employeur de ses collaborateurs, qui découle de la liberté d’entreprise, que lorsque plusieurs salariés demandent à bénéficier de la priorité de réembauche, l’employeur n’a pas à respecter un ordre déterminé et peut librement choisir celui qu’il retiendra en fonction des intérêts de l’entreprise sauf à communiquer au juge, en cas de contestation, les éléments objectifs sur lesquels ils s’étaient appuyés pour arrêter son choix.
Dans un arrêt du 11 avril 2012, la chambre sociale revient sur ces deux limites et en atténue légèrement la portée. En l’espèce, alors que le salarié n’avait pas manifesté son désir de bénéficier de la priorité de réembauche, l’employeur lui avait indiqué par courrier la faculté que ce dernier avait d’en demander le bénéfice et le sollicitait pour l’exécution de missions temporaires. Le salarié avait accepté la proposition qui lui était faite tandis que l’employeur a ultérieurement embauché deux anciens salariés sur des postes correspondant à sa qualification et qui ne lui ont pas été proposés.
Le premier débat portait sur la question de savoir si le salarié avait, comme le prévoit le texte, demandé à bénéficier de la priorité de réembauche. À cet égard, la chambre sociale indique que la demande tendant au bénéfice de la priorité de réembauche peut être présentée, soit de manière spontanée, soit en réponse à une sollicitation de l’employeur, pourvu qu’elle soit explicite. La chambre sociale juge que le salarié avait bien demandé à bénéficier de cette priorité étant donné, d’une part, que, dans sa lettre, l’employeur lui avait indiqué qu’il pouvait manifester son désir d’user de la priorité de réembauche et lui avait proposé plusieurs postes de travail et, d’autre part, que le salarié avait donné une réponse positive et opté pour l’un des postes proposés. Ceci étant admis, l’employeur était-il tenu, pour autant, d’informer le salarié de la disponibilité des postes sur lesquels avaient été embauchés les deux autres anciens salariés ?
La Haute juridiction répond par l’affirmative. Rappelant le principe selon lequel, en présence de plusieurs candidatures sur un même poste, l’employeur n’est pas tenu de suivre un ordre déterminé pour le choix du salarié réembauché, la chambre sociale précise toutefois qu’il incombe à l’employeur, en application de l’article L. 1233-45 du code du travail, d’informer préalablement tous les salariés licenciés pour motif économique qui ont manifesté le désir d’user de la priorité de réembauche, de tous les postes disponibles et compatibles avec leur qualification. La solution est pleinement justifiée. Nonobstant la liberté de choix de l’employeur, il doit, aux termes de l’article précité, informer le salarié ayant demandé à bénéficier de la priorité de tout emploi devenu disponible correspondant à sa qualification. Il s’agit de permettre à l’ensemble des salariés qui ont opté pour la priorité d’être candidat, ce qui n’est pas inutile lorsque l’on souhaite être retenu.
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