Soc. 11 sept. 2019, FP-P+B, n° 17-24.879
L’arrêt rapporté marque une évolution importante concernant l’indemnisation du préjudice d’anxiété. Alors que jusqu’à présent seuls les travailleurs exposés à l’amiante pouvaient prétendre à une telle indemnisation, le champ d’application de ce préjudice recouvre désormais toutes les substances pathogènes. Plus précisément, les travailleurs peuvent obtenir des dommages-intérêts sur le fondement d’un manquement de leur employeur à son obligation de sécurité, dès lors qu’ils justifient « d’une exposition à une substance nocive ou toxique générant un risque élevé de développer une pathologie grave et d’un préjudice d’anxiété personnellement subi résultant d’une telle exposition ». S’il veut échapper au versement de ces sommes, l’employeur doit alors démontrer qu’il a pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.
Dans la présente espèce, des mineurs de charbon avaient saisi le conseil de prud’hommes aux fins d’obtenir le paiement de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice d’anxiété et du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité. Ils considéraient que les mesures prises par l’employeur étaient insuffisantes pour prévenir les risques liés à l’inhalation de poussières dans la mine : le système d’arrosage destiné à capter ces poussières, pas assez performant, nécessitait le port de masques ; or le nombre de masques fournis par l’employeur était insuffisant et la plupart étaient défectueux et inadaptés à une activité physique intense.
Les juges d’appel ont rejeté ces demandes, estimant que, conformément à la jurisprudence alors en vigueur, le préjudice d’anxiété ne pouvait être indemnisé que pour les travailleurs exposés à l’amiante et éligibles à l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (ACAATA). Par ailleurs, selon les juges, l’employeur n’avait pas manqué à son obligation de sécurité car les salariés étaient informés des risques et des mesures de sécurité, les outils de sécurité étaient régulièrement contrôlés, les travailleurs bénéficiaient d’un suivi médical renforcé et leurs recommandations en matière de sécurité étaient prises en compte.
La Cour de cassation retient une solution tout autre. Elle estime que ces éléments ne suffisent pas à établir que l’employeur a effectivement mis en œuvre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, telles que prévues aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 précités. Aussi renvoie-t-elle l’affaire devant une cour d’appel qui devra apprécier l’existence d’un préjudice d’anxiété subi par les mineurs et du lien de causalité entre ce préjudice et un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.
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